Quelques mots sur notre maison et notre directrice

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« L'Orient [...] c'est un point qui nous guide. »

André Miquel

Cette terre d’Orient a engendré nos prophètes et nos dieux, c’est là qu’ont surgi les premières villes, on y a inventé l’écriture et les premiers livres du monde sont nés ici.

Terre trois fois sacrée et tragique, elle reste profondément marquée par tous les grands mythes de l’humanité qu’elle a mûris ; et toutes les civilisations de ces orients se rejoignent dans leur idéal.

Orients s’attachera donc à mettre en lumière la diversité des courants de pensée mais surtout leurs convergences.

Les textes fondateurs qui sont toujours si vivants, les mouvements et courants mystiques qui cohabitent si bien ici, la lutte des femmes qui à chaque instant doivent prouver qu’elles sont les égales des hommes, et l’esthétique qui explose sous toutes ses formes.

Essais, textes inédits et traductions, calligraphies, dessins, photo et bande dessinée, tout ce qui dit l’intemporalité de cette terre marquée par le terrestre et le céleste et son renouveau libéré constitueront cette collection, Orients.

 

« Ysabel Saïah Baudis, la gondolière de l’Orient »

Par Marc Yared

Journaliste et écrivain, cette jeune éditrice met à la portée de tous les joyaux de la culture et de la société arabe

Mais les Orients – soleils levant (Machrek) et couchant (Maghreb) – ne se réduisent pas à une sinistre litanie. Ils rayonnent aussi de Beauté, de Vérité, de Vitalité, pour qui sait y regarder de près. Ysabel Saïah Baudis est de ceux-là : elle voit, elle sent, elle sait ; et, passionnément, elle veut partager son savoir et son enchantement. Il faut dire qu’Ysabel a tout du gondolier qui vous découvre les bras de mer et les rivages du Sud : née à Alger d’une mère pied-noir et d’un père algérien, cette journaliste n’a cessé d’explorer et d’exposer les splendeurs des sociétés et des cultures arabes, trop souvent caricaturées. En témoignent ses œuvres : Pieds-noirs et fiers de l’être (1988); Oum Kalsoum, l’étoile de l’Orient (1985 et 2004, traduit en arabe); Haram, itinéraire des femmes orientales (2003); Le Qohélet, calligraphié par Henri Renoux en français, arabe et hébreu (2004) ; Les Mille et une nuits érotiques, illustrées par Van Dongen (2008 et 2012).

Aujourd’hui Ysabel Saïah Baudis va plus loin. Elle offre aux explorateurs des côtes méridionales de la Méditerranée un nouveau moyen de transport : les éditions Orients (orientseditions.fr), qui proposent de belles envolées… Le Livre de Kalila et Dimna, traduit de l’arabe par l’un des plus fins connaisseurs de l’Orient – André Miquel, ancien administrateur de la Bibliothèque de France – est un recueil de fables animalières venues d’Inde et de Perse qu’Ibn al-Mouqaffa adapta avec talent, au VIIIe siècle …pour le plus grand bonheur d’un La Fontaine. Un condensé de sagesse universelle, éternelle, superbement illustré par des manuscrits du XVe siècle. Hallaj chant d’amour, postfacé par le poète et diplomate libanais Salah Stétié, révèle pour sa part – à travers de somptueuses calligraphies – les élans d’un des plus grands mystiques de tous les temps, qui vécut au Xe siècle. Ysabel Saïah Baudis avoue sans peine sa fascination pour le soufisme, qui vénère si souvent l’Éternel avec les accents de la passion charnelle. Sous le label des éditions Orients, un ouvrage émaillé de vers classiques persans recensera bientôt quelque deux cents mots de la langue arabe dédiés au corps féminin, qu’un grand maître soufi a empruntés pour célébrer la Divinité.

D’autres titres édités par Orients témoignent d’une ambition majeure : loin de se borner à exhumer les gloires du passé, Ysabel Saïah Baudis veut montrer les richesses du présent arabe, et ses promesses. La Femme est l’avenir de l’homme, sous la plume du dessinateur et humoriste tunisien Lotfi, plaide par la caricature pour l’émancipation du beau sexe et l’égalité des droits. Oum Kalsoum for ever retrace, à travers des images et des témoignages inédits recueillis par Ysabel Saïah Baudis, l’itinéraire de la Grande Dame (« El-Sett ») qui par le verbe, le chant et la musique distilla le merveilleux dans le quotidien de cent millions d’Arabes.

Si Ysabel Saïah Baudis se soucie de la qualité – comme l’atteste le choix des auteurs, de l’illustration et du papier édités par Orients – elle vise délibérément le grand public. La place faite à la photo, au dessin, à la caricature, le format parfois ramassé, le prix modique : tout tend à séduire « les jeunes, les paresseux, les gens pressés ». Impossible d’ignorer ces segments de la société quand on veut jeter des ponts entre les peuples et briser des préjugés séculaires… Bref, la paix et la solidarité par la connaissance et l’estime : tel pourrait être le mot d’ordre d’Orients et de sa fondatrice.